Crédits photo @SOMSACKDRAWINGS - Dessin de la bibliothèque Sainte-Geneviève
Crédit photo@VOGUECORÉE 2012
Apologie de la lenteur, une ôde aux bibliothèques
Adaptation d'article original écrit pour Womanspecter
Le temps est le luxe du XXIème siècle. Le prendre est désormais un acte héroïque, dans un monde où les sites web annoncent les minutes à consacrer à un billet comme les dollars dépensés dans la journée d’un lecteur potentiel.
Avertissement: vous êtes sommés d’avoir le temps.
Plus un mot, le geste lent. Vous entrez dans une bibliothèque.
Les sens en éveil dans l’antre du savoir.
Inspiration profonde. La poussière amassée chatouille la curiosité plutôt que les muqueuses nasales. Ça sent l’ancien, le cuir et la connaissance millénaire.
L’expert et le profane, tout le monde a sa place ici.
Du régulier qui se délecte de son Aksionov, perdu entre la première et la 1200ème page, au curieux ponctuel qui franchit la porte du temple des lettres, intemporel… Dégainant si tôt son smartphone pour Instagramer l’instant.
L’instant. Ce moment suspendu en vol qu’on passe notre temps à tenter de rattraper, se persuadant qu’on gagne des minutes grâce aux facilitations technologiques du Saint-Digitalisme. Mensonge collectif le plus abouti de notre génération.
Malheureux. Arrêtez tout ! Vous entrez dans une bibliothèque.
La porte franchie, il est question de prendre son temps. D’avancer sur la route chérie et si précieuse de la lenteur. Une ligne plus une ligne comme des pas sur un chemin de pèlerinage.
Une page additionnée de ses consœurs qui font un bouquin. Un livre. Et finalement, un objet d’art.
La lecture est un des rares domaines où il n’est pas possible d’accélérer l’action, où la temporalité est vécue dans son entièreté, incompressible, pas abrégée.
Pas de robotique, pas de tour de passe-passe. On ne peut pas réduire le temps nécessaire à la lecture. La seule façon de lire un livre est de se livrer à lui, justement. L’intégralité de son attention et de sa personne rivée sur le descriptif justifié dont la police -paradoxalement- nous libère.
Puisqu’au quotidien cette retraite temporelle est un luxe inaccessible, ci-et-là dérangée par un client exigeant, une manucure urgente ou un mail distractif, j’ai pour habitude de me retrouver le nez au milieu des pages d’un Folio®, des iconos d’un Rizzoli®, d’un volume de la Pléiade®, cachée entre les rayons où les héros de la plume patientent par ordre alphabétique.
Le doigt balaye des ouvrages entre les étagères de bois, bercé par la voix chuchotante d’une bibliothécaire sans âge.
Quelle que soit la ville ou le voyage, ma controlfreakness s’associe à mon attrait pour le beau pour de dénicher la bâtisse millénaire imprégnée de mémoire qui se cache dans chaque cité. À l’image d’une perle dans un écrin, ces lieux désuets ont un charme suranné et rassurent par leur constance.
L’intemporalité gage de la valeur des années.
Les bibliothèques sont des institutions qui protègent la richesse de cet art humain qu’est l’écriture. Rendons lui grâce, chérissons-le.
Osons suspendre le temps. Faire un tour pour lire -à côté de chez soi -dans un dédale labyrinthique célébré par Borges, où l’infini des possibles est concentré dans les pages séculaires, jalousement gardées des hordes digitalistes.
Bibliothèques fantastiques et publiques :
FRANCE
Bibliothèque Sainte-Geneviève, Paris
Bibliothèque Mazarine, Paris
Bibliothèque municipale, Ajaccio, Corse
AUSTRALIE
The State Library, New South Whale
MEXIQUE
Bibliothèque Jose Vasconcelos, Mexico
ETATS-UNIS
George Peabody Library, Johns Hopkins University, Baltimore
BRESIL
Bibliothèque royale portugaise, Rio de Janeiro, Brésil
HONGRIE
Wenckheim Palace Library, Budapest
SUEDE
Bibliothèque publique de Stockohlm – Crédits Olivier Charles
ROYAUME-UNI
Bibliothèque Lincoln, Londres
De merveilleuses librairies anciennes
ARGENTINE
El Ateneo Grand Splendid, Buenos Aires
MEXIQUE
Cafebrería El Pendulo, Mexico
PORTUGAL
Lello Irmão, Porto