L’EURATEX, ou European Apparel and Textile Confederation, vient de nommer à sa tête un nouveau président : l’entrepreneur portuguais Mario Jorge Machado. Quel est le rôle de cette organisation dans le fonctionnement de l’industrie textile européenne, et quelle direction compte lui donner ce nouveau dirigeant ? La réponse aura un poids certain, car la confédération représente environ 200 000 entreprises pour 1,3 million d’emplois et 64 milliards d’euros d’exportations.
A quoi sert l’EURATEX ?
L’Euratex, ou European Apparel and Textile Confederation, est une association fondée en 1996. Sa mission est de “définir et promouvoir auprès des autorités de l’UE des mesures qui renforcent la compétitivité internationale des entreprises du secteur ; de suivre et de contribuer à la mise en œuvre des accords bilatéraux et multilatéraux signés par l’UE afin de créer des conditions commerciales équitables.” Elle défend donc les intérêts des entreprises de textile et de mode auprès de l’Union Européenne, notamment via du lobbying depuis 2008.
Si l’EURATEX est concentrée sur la croissance économique des entreprises qu’elle défend, elle se positionne également sur des enjeux liés à la durabilité, comme la réglementation des produits chimiques, la circularité, les chaînes de production… Elle a notamment lancé le projet Rehubs, repris par l’Union Européenne, une initiative visant à coordonner les divers acteurs européens de la collecte, du tri et du recyclage des déchets textiles. Un enjeu aussi écologique qu’économique, car l’organisation estime que le recyclage textile pourrait générer 15.000 emplois directs en Europe et entre 3,5 et 4,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires, d’ici à 2030.
Un profil expérimenté, concentré sur la croissance
L’entrepreneur portugais Mario Jorge Machado a été élu le 14 juin dernier, au cours de l’assemblée générale d’EURATEX. Il est actuellement actionnaire et directeur d’Adalberto Textile Solutions, une entreprise d’innovation textile qui s’est concentrée sur la R&D en circularité et durabilité sous son impulsion en 2016. Adalberto Textile Solutions fournit principalement des marques haut-de-gamme. Machado préside également l’Association portugaise du textile et de l’habillement ou ATP (équivalent de la Fédération Française de Prêt-A-Porter) depuis 2019. Il préside son conseil stratégique pour l’environnement et la durabilité et défend ses intérêts au conseil d’administration de la confédération entrepreneuriale du Portugal (CIP), une organisation s’adressant aux institutions portugaises pour “mettre en œuvre des politiques sociales et économiques qui sont alignées sur les intérêts et la compétitivité des entreprises”. Il a donc une longue expérience des organisations patronales au sein d’un pays où l’industrie textile s’est fortement dynamisée.
Selon EURATEX, l’expertise de ce diplômé en ingénierie des polymères “s’étend de l’amélioration continue des processus au développement d’équipes commerciales B2B et de modèles économiques B2C.”
Quelle est la vision de Machado pour l’EURATEX ?
Lors de son discours d’investiture, Machado a clairement exprimé une volonté de se concentrer sur la croissance du secteur en priorité, dans le prolongement de la ligne historique de l’organisation : “Les derniers indicateurs montrent que l’industrie européenne a des taux de croissance inférieurs à ceux de ses concurrents ; c’est quelque chose que nous devons inverser. Les décideurs politiques doivent comprendre que l’industrie textile ne peut pas être une monnaie d’échange dans les négociations mondiales. Nous voyons ce que font les États-Unis pour soutenir leur industrie, et nous voyons ce que fait la Chine pour soutenir son industrie.”
Il a également sous-entendu des réserves sur certaines législations européennes, insistant sur le fait que l’Union devait se concentrer davantage sur les consommateurs sans surcharger les manufacturiers. En concluant : “C’est pourquoi EURATEX a un rôle de lobbying très important à jouer pour que le processus législatif se déroule en fonction de la capacité d’adaptation du secteur.” S’il n’est pas surprenant que le président d’une organisation dédiée aux entreprises insiste pour que des législations ne les contraignent pas outre-mesure, on peut se demander ce que donnera l’application concrète de cette approche, et quelle influence elle aura sur les législateurs européens lorsqu’ils voudront pousser la mode locale à limiter son impact environnemental.
