Lorsqu’on aborde le sujet de la mode responsable, il est rare que nous considérions ce qui se pose sur le bout de notre nez. Pourtant, alors que la lunetterie a longtemps été le fruit d’un travail artisanal, les lunettes sont dorénavant produites massivement à la chaîne, réduisant ainsi la qualité de nos montures au fil des années. Comme à l’image de la mode et de la fast fashion, les matières pétrochimiques se sont rapidement imposées chez nos opticien·ne·s. Rares sont les études sur les externalités environnementales et humaines de la production de lunette dans le monde, tout comme les méthodes pour gérer les paires délaissées. Heureusement, des marques et des opticien·ne·s engagé·e·s en physique et online, cherchent à rendre le monde de l’optique plus vertueux en proposant des alternatives. Recyclage, dénichage de pépites vintage, reconditionnement… On fait le tour des options dans cet article.
Lunetterie et durabilité, une industrie qui voit flou
En France, ce sont près de 21 millions de paires vendues, avec 5 millions de paires de solaires par an. Les questions relatives à l’impact et à la circularité sont très peu abordées dans le secteur, comme en témoigne l’étude du cabinet OpinionWay, à l’attention de la chaîne Atol les opticiens, qui estimait à la suite de son sondage de 2015 (déjà) près de 100 millions de paires dormantes dans nos tiroirs.
Côté montures, la lunetterie a du mal à se détacher de l’usage de plastique, en particulier depuis que la fast fashion s’est emparée de modèles éphémères. Il existe bien des marques qui réalisent leurs paires à l’aide de PES recyclé, mais sans appel, la consommation la plus durable reste celle d’occasion. La prise de conscience peine à émerger, car les lunettes sont des produits qui, dans l’inconscient collectif, relève soit du médical, soit du style jetable. qui relève du médical. Comme sommes peu à nous interroger sur l’empreinte carbone du paracétamol, le premier cas passe à la trappe et le second nous pousse à répondre aux sirènes du marketing. Les leaders du marché de l’optique sont, respectivement, le franco-italien EssilorLuxoticca (3 500 nouveaux modèles, chaque année) suivit du japonais Hoya, encore bien loin d’une production priorisant la circularité, le remploi de matière ou les composants plus propres.
Bref, nous l’aurons compris : la paire la plus propre est celle qui existe déjà. En attendant que toute l’industrie se mette au pas et pour être sûr·e de faire le bon choix, voici des adresses spécialisées dans le vintage, la seconde main, la réparation et les modèles à moindre impact.
Seconde vue, les lunettes vintage de créateur
Seconde vue est un e-shop de lunettes d’occasion et vintage qui n’a pas froid aux yeux. La plateforme propose une sélection pointue de modèles anciens, notamment des paires de grands créateurs tels que Thierry Mugler, Gucci, Balmain, Cartier ou encore Prada. Dédiée aux modèles anciens auxquels on donne une seconde vie, l’équipe d’opticiens seconde vue se charge de vérifier chaque paire individuelle afin de s’assurer de son authenticité, sa qualité et ses défauts possibles. Vient alors l’étape de reconditionnement : elles sont alors nettoyées et réajustées. Le pus complexe dans l’opération ? Choisir !
L’Optique Durable, l’opticien révolutionnaire aux 20 000 paries made in Jura
Si vous souhaitez apprendre de l’histoire votre future monture par un passionné, rien de mieux que la boutique intimiste de David Benhaïm, situé dans le 11 e arrondissement, non loin de la place de la République. Ce véritable amoureux de lunettes rachète des stocks dormants des années 19220 à 2000 auprès d’entreprises jurassiennes, allemandes et italiennes. Sur le principe du “Old New Stock”, il propose ainsi une étendue de modèles jamais portés, et adapte selon nos besoins et notre morphologie la pièce la plus adaptée. La marque garantit la réparation de la monture sur une durée de deux ans, même si vous les cassez par accident. Si la réparation se veut compromise, David prend charge en le remplacement pour une monture alternative, jusqu’à 6 mois après la date d’achat. On retrouve des modèles aux styles variés et à des prix qui nous font des yeux de velours.
Pour vos beaux yeux, l’opticien à remonter dans le temps
Cap sur la Riviera pour une adresse ô combien intimiste. Pour Vos Beaux Yeux propose une étendue de trouvailles optiques, faisant redécouvrir les fièvres créatives ô combien originales qu’a connues cet objet au fil de ses réinterprétations. Des années 1900 à 2022, ce lieu en plein cœur de Nice nous donne une délicieuse sensation de voyage dans le temps. Cette adresse est parfaite pour découvrir des montures aux designs audacieux et rare de nos jours.
Mercato Paris, l’opticien qui offre une seconde vie à nos lunettes
Mercato est un e-shop, ainsi qu’un ensemble de boutiques parisiennes qui réévaluent et reconditionnent les objets de particuliers. TV, téléphone, appareil photo, mais aussi de nombreux modèles iconiques de paires d’occasion, incluant des marques telles que Ray Ban, Fendi, Persol, Komono, et Chloé.
Lunettes de Zac, le reconditionnement qui favorise l’insertion professionnelle
Lunettes de Zac est un opticien basé à Lille et un e-shop. Depuis 2020, la plateforme est tenue par des travailleur·euse·s en situation de handicap qui se chargent de remettre à neuf les différents modèles. On peut d’ailleurs chacun·e participer à son échelle, en repérant un point de collecte non loin de chez nous. Pour cela, il suffit de se rendre sur la map du site. En échange de nos paires oubliées, Zac remet 5% de réduction sur notre prochain panier. Concernant les verres, Zac privilégie les artisans locaux avec son verrier français Château-Thierry dans l’Aisne.
La Recyclerie De Lunettes (Nantes)
En voilà une adresse pétillante dans la cité des Ducs. La Recyclerie à Lunettes est l’adresse ultime pour les amoureux de montures vintage. Ce projet, porté par Sonia, opticienne indépendante, sélectionne des modèles aux designs affirmés des années 30 à 90. Démontée, nettoyées et polies, elle propose des montures de grandes marques telles que Nina Ricci, American Optical, Balenciaga, Balmain ou encore Cazal.
Rebelle, la marketplace haut de gamme
Rebelle est une plateforme allemande fondée à Hambourg qui est fait partie de ces adresses incontournables de la seconde main de luxe. Rebelle se positionne dans le haut de gamme en proposant une étendue d’articles de grandes Maisons. Cotées montures, le choix est presque infini, avec des noms plus qu’évocateurs, tels que Valentino, Miu Miu, Versace ou encore Tom Ford.
Vestiaire Collective, la référence de la seconde main de luxe
On ne présente plus ce marketplace précurseur de la seconde main de luxe. Comme à son habitude, le site Vestiaire Collective rassemble une panoplie de lunettes de grandes marques de luxe telles que Céline, Dior, Gucci ou encore Loewe. Elles sont majoritairement issues des tiroirs de particulier·e·s, dont la plateforme s’assure de l’authenticité grâce au travail méticuleux d’expert·e·s. Si vous n’avez pas froid aux yeux, vous pouvez même proposer une offre au vendeur de la paire de vos rêves et espérer peut-être un tarif intéressant. L’audace peut permettre à la fois une singularité et de belles économies.
Oculus Reparo la plateforme des grands classiques d’occasion
Oculus Reparo est une plateforme lancée par deux opticien·ne·s passionné·e·s. Julien et Sébastien ont constaté le coût environnemental colossal associé à la production de lunettes neuves et ont ainsi décidé de lancer leur plateforme en ligne de paires d’occasion. Aujourd’hui, elle comptabilise plus 2000 références de montures, auxquelles on peut apposer la correction que le souhaite. On peut également proposer ses paires endormies pour les envoyer par voie postale et obtenir en échange un bon de réduction allant jusqu’à -25%, en fonction de la valeur de reprise.
Réno Binocle, le reconditionnement vertueux
Réno Binocle se charge de trier puis de remettre à neuf des trouvailles vintage Le catalogue est composé de divers modèles, principalement des grands noms de l’optique tels que Ray Ban, Lafont ou encore Chanel. On retrouve des lunettes de vue et quelques pièces en solaire. Si on le souhaite, le site propose même un service de pièces détachées pour réparer une paire. On peut également proposer à la reprise paires endormies, envoyées par voie postale en échange d’un bon de réduction allant jusqu’à -25%. Même chose pour les paires abimées.
L’œil de L’Odon, une sélection de paires fabriquées en France
Basée à Aunay-sur-Odon, L’œil d’Odon est une adresse énigmatique portée par Laura Xavier qui souhaitent mettre en avant les savoir-faire optique du territoire français. Dans la boutique, on retrouve essentiellement des moutures façonnées par des artisan·e·s des quatre coins de la France, d’Auvergne, de Normandie ou encore Bourgogne. Les modèles sont tous réalisés dans des matières durables : du bio acétate, de l’acétate recyclé, de l’ardoise ou des coquillages. Si vous ne pouvez pas vous déplacer, l’équipe propose depuis récemment une consultation par un ophtalmologue, via un profil Doctolib.
Dingue De Lunettes l’opticien de stocks dormants
Le lunetier pose ce constat : alors que les créations des lunettes récentes semblent toujours inspirées du passé, pourquoi choisir une copie quand on peut trouver les modèles originaux ? Dingue De Lunettes représente la concrétisation de l’ambition de Dan, fondateur de la marque, de placer la récupération au centre de sa démarche. L’opticien s’approvisionne en montures dans toute l’Europe, soit en modèles d’occasion, soit issus de stocks dormants. Vient alors l’étape de la remise à neuf, à la main, pour redonner toute leur splendeur. L’enseigne est présente à Paris et Lyon ou l’entreprise aide à rendre accessibles des dispositifs oculaires.
Peep Eyewear : le temple de la lunette vintage
Aucune sélection shopping responsable ne saurait être complète sans une boutique vintage ! Peep Eyewear est une boutique britannique qui récupère et répare des montures de seconde main ultra-stylées. La sélection est large et il y en a pour tous les goûts. Malheureusement, il n’est pas possible d’essayer les lunettes en dehors du Royaume-Uni. Il faudra donc commander avec précaution pour éviter les retours produits inutiles.
Les marques de lunettes neuves éco-responsables
Moken : des lunettes naturelles, minérales et végétales
Marque française originaire des Landes, Moken imagine et fabrique dans l’hexagone des lunettes en matériaux bio-sourcés qui sentent presque la balade en forêt : en bois, en liège ou même en pierre. La marque a aussi trouvé une alternative au plastique. Pour remplacer l’acétate, elle utilise des biopolymères à base de plantes, notamment du ricin, totalement biodégradable. Pour la souplesse et la solidité, la plupart des modèles contiennent aussi du métal recyclé, voire sont entièrement conçues dans ce matériau. Dans le catalogue de la marque, on trouve aussi bien des lunettes de vue que des solaires. Pour les voir, les toucher, les essayer, pas de problème : la marque dispose d’une vingtaine de distributeurs partout en France (ou presque). La liste est disponible sur son site.
7plis : des lunettes habituées aux sensations fortes
Dans un style vintage américain, la marque française 7plis produit des lunettes biodégradables en bois recyclé. Niveau impact, on peut difficilement faire mieux. Toutefois, il ne s’agit pas de n’importe quel bois ! Les lunettes 7plis sont taillées dans du bois de skateboard usagés et upcyclé ! Si vous aimez le concept mais que vous ne trouvez rien qui colle à votre style chez 7plis, vous pouvez également regarder du côté de chez Skrap, une marque canadienne qui fabrique également des lunettes en skateboards upcyclés. Seul problème, il n’y a à notre connaissance pas de boutiques en France et il faudra commander sa monture en ligne sans voir le produit (tandis que les lunettes 7plis sont disponibles en boutique partout en France).
Nina Mûr : des lunettes originales pour un look de designer
Pour les plus audacieu·x·ses d’entre nous, le studio madrilène Nina Mûr propose des montures ultra-originales en bois de bouleau. Seul bémol, le bois est collé à l’aide de résine époxy. On ne peut pas toujours être parfait. Les montures Nina Mûr sont disponibles dans la plupart des grandes villes de France. Vous devriez donc pouvoir les essayer sans trop de problèmes !
Nota bene : il est important de ne pas complexer
Les lunettes coûtent cher et tout le monde n’a pas les moyens de dépenser plusieurs centaines d’euros pour une monture stylée et éco-responsable. Néanmoins, lorsqu’on en prend soin, on peut tout à fait garder une paire de lunettes plusieurs années, voire des décennies. Dans ce cas, la matière dans laquelle ses lunettes sont taillées importe moins. Le comportement le plus écolo reste d’acheter une paire qu’on adore et de tout faire pour la garder toute une vie en changeant les verres à mesure que sa vue évolue. Si votre budget ou le temps que vous pouvez dédier à la recherche d’une monture ne vous permettent pas de vous procurer autre chose qu’une paire de lunettes classiques, ce n’est pas si grave. Évitons simplement d’en changer tous les ans !
Pour découvrir quelques autres marques : le label Optic For Good
Depuis quelques années, le petit monde des lunetiers voit émerger Optic for Good, un nouveau label français dont l’objectif est de rassembler et de présenter les marques et les boutiques optiques vertueuses. Le réseau n’est pas encore très développé mais une visite sur le site du label peut vous aider à trouver un·e opticien·ne responsable près de chez vous.