Le jean est l’indispensable de nos armoires, il est de loin le vêtement le plus universel. S’il est souvent considéré comme un produit basique, il est en réalité très complexe. Il fascine les puristes, les passionnés mais aussi les grands couturiers : “Je n’ai qu’un regret : ne pas avoir inventé le jean.” confie un jour Yves Saint-Laurent. Parce qu’il est difficile de distinguer un bon jean éco-responsable parmi l’offre bien fournie, on donne la parole à des experts passionnés qui nous en dévoilent les secrets. Sur ce point, ils sont tous unanimes : la durabilité est la clé !
AVN
Chez AVN, le critère le plus important est la matière, “nos jeans sont en 100% coton brut sans élasthanne. On utilise une toile selvedge, épaisse et ultra-résistante pour obtenir un jean durable et recyclable” souligne Arthur, co-fondateur de la marque. Le jean est sculpté sur le corps au fur et à mesure qu’il est porté “les premiers jours, il n’est pas très agréable à porter, il est similaire à du carton, puis il s’adapte et se détend après une semaine de port.”
Les jeans sont bruts et ne subissent pas de délavage, “les produits sont teints de manière naturelle avec de l’indigo, il n’y a pas de fixation de couleurs.” Le délavage se fait au gré du port et au fil du temps “le jean sera différent d’une personne à l’autre en fonction de la manière dont on s’assoit, si on le porte sous la pluie”.
Un bon jean se caractérise par la qualité de l’assemblage et des finitions avec “des surpiqûres doublées sur l’entrejambe qui est un point sensible et des points de chaînettes qui sont des points de couture qui permettent de rendre le jean résistant.”
Le fit a son importance “on a trois coupes : une coupe ajustée très slim, une coupe droite ajustée semi slim et une coupe regular qui va être plus large”.
Le site AVN
Ecclo
Ecclo a créé des jeans à partir de stocks de tissus non exploités à cause d’un défaut de tissage. “En découvrant la toile, on a eu l’idée de la valoriser, il y avait de la matière pour faire 1000 jeans avec les rouleaux de tissu”, raconte Remy, le fondateur de la marque. La communauté a participé activement à l’élaboration du modèle (couleur du fil, coupe, taille), par le biais d’un questionnaire, “étant donné que l’on est dans une démarche d’éco-responsabilité pour faire des modèles durables, on avait besoin de faire des modèles qui convenaient à la communauté”.
Quatre modèles sont disponibles en précommande avec une volonté “d’être à la frontière de l’intemporel en apportant une certaine esthétique” tout en valorisant respectivement les rouleaux de coton bio brut avec ou sans élasthanne.
Pour Ecclo, la confection des jeans dans un atelier français spécialisé est un gage de qualité “si on veut baisser les frais on a plus de chances de concevoir un produit qui ne durera pas dans le temps avec moins de coutures et des fils moins solides.” La solidité d’un jean relève aussi de la confection “les coutures du jean sont en coutures rabattues, une étape qui n’est pas réalisée en fast-fashion, les fonds de poche sont faits dans un tissu résistant et solide, les poches sont renforcées avec des rivets, le fil épais et il y a des points d’arrêts.”
Le site Ecclo
Asphalte
Chez Asphalte, le choix de la toile du jean est primordial, “la toile selvedge 100% coton est achetée au Japon” explique Alban, le directeur artistique junior de la marque. Cette matière est considérée comme une des plus belles toiles de jean au monde, “le selvedge donne un grain de toile intéressant, avec des aspérités qu’on adore chez Asphalte.”
Au-delà de la matière, le poids de la toile est essentiel, “on trouve que le poids judicieux pour avoir une bonne tenue et un jean qui va bien se délaver est de 14 oz”. Le oz est une unité de mesure utilisée dans le monde du jean : 1 oz = 28.4 grammes.
Le jean est un des produits les plus polluants dans le textile, notamment du fait du délavage qui exige souvent des produits chimiques et une grande quantité d’eau. Asphalte travaille avec un partenaire qui délave le jean en circuit fermé avec un système de pierres et d’enzymes, “les jeans sont déclinés en différents délavages sans utiliser de produits chimiques”.
Bien choisir la taille de son jean est fondamental, “il doit être un tout petit peu serré au niveau de la taille […] la toile en coton, un peu rigide et va se détendre à terme”. Un bon jean ne doit pas nous aller parfaitement à l’essayage, sinon il sera trop grand après quelques temps et risque de finir au placard.
Le site Asphalte
Green lion
“Nous sommes une marque de mode puis nous sommes une marque écolo” déclare Zakaria, fondateur de Green Lion. La marque propose un jean unisexe, construit pour convenir aux hommes comme aux femmes. La composition de la toile, en coton biologique, en polyester recyclé avec un brin d’élasthanne permet d’avoir une hybridité des coupes “on a une coupe droite Lallos et une coupe ajustée entre le droit et le slim Serengeti”. Green Lion opte pour des jeans dont le poids tourne autour de 11 oz afin d’être portés en hiver comme en été.
Chez Green Lion, le bon jean porte des engagements, “il doit respecter la dimension humaine et écologique”. La marque optimise la coupe, une étape qui consiste à découper les pièces du jean dans le tissu, en imbriquant les pièces du jean comme dans une partie de Tétris. Un effort qui réduit considérablement les chutes de tissu “le taux d’efficience de la matière dépasse 97%.” Un jean Green lion est lavé en moyenne avec 30cl d’eau, l’équivalent d’un verre d’eau puis séché à 30 degrés “cela permet une économie de 95% d’eau et de 75% d’énergie par rapport à un processus normal.”
Le site Green Lion
Bolid’ster
Le critère phare d’un bon jean est “la durée de vie en tant que solidité mais aussi en tant que coupe“ précise Pierre Henry, fondateur de Bolid’ster. Le jean est une matière vivante, comme nous, elle évolue avec le temps. L’écart entre le jean de fast-fashion et le bon jean se creuse alors davantage, l’un se déforme et poche alors que l’autre se patine avec style.
Chez Bolid’ster, les fibres d’Armalith® qui constituent l’armure protectrice du jean sont stretchs et thermo fixées à froid, “des tests ont été faits jusqu’à mille lavages et il n’y a aucune perte d’élasticité. Pour Zara, c’est 12 lavages chez un fournisseur pour voir si c’est acceptable”. Le nombre de jeans que l’on consomme en enfilade est source de pollution. La marque aspire volontairement à des coupes classiques, modernes, qui ne sont pas créatives, “on essaye de ne pas augmenter le nombre de modèles, on a deux coupes pour homme : une coupe droite et une coupe plus ajustée sans être slim.” Si les jeans Bolid’ster sont adoptés par les motard·es pour leur résistance à l’abrasion exceptionnelle, ils peuvent aussi convenir aux personnes en quête de durabilité.
Le site Bolid’ster
Atelier Tuffery
À la question qu’est-ce qui fait un bon jean, Julien, à la tête de Atelier Tuffery répond “c’est une question à laquelle il est impossible de répondre, un bon jean pour quoi faire ? Tout va dépendre de l’usage.” La marque qui souffle ses 129 bougies, prend plaisir à s’adapter aux désirs et aux besoins de chacun, “il y a des personnes qui recherchent du confort, du style, de la durabilité… Le challenge est de faire le bon mélange de tout”. Le cœur et le corps de la collection sont fait de pièces indémodables, “pour nous le bon jean est le formidable intemporel, celui que l’on met pour sortir et que l’on ressort 10 ans après en se disant qu’il est toujours aussi beau.”
La durabilité est un pilier central pour un bon jean. Des belles fibres en bonne quantité permettent de créer un fil solide et une toile robuste. Un bon jean a très peu ou pas de polyester et 2% d’élasthanne sur certaines tailles comme les slims. “Pour les marques de fast-fashion qui sortent 12 collections par an, l’élastique comble tous les défauts, le jean va à tout le monde et personne en même temps”. À l’inverse, une toile dense et épaisse en coton “oblige à avoir une coupe parfaite avec une matière rigide” pour apporter du confort à toutes les morphologies. Les techniques de confection ont leur importance, “plus elles sont qualitatives plus elles nous prennent du temps : le cordon de zip est piqué deux fois, la densité du point est de 5 points au cm au lieu de 3”. Côté finition, “il faut regarder les qualités du surfilage il doit y avoir de la densité de fil et il doit maintenir le contenu de la toile.” Ces détails qui ornent le jean font la différence dans la durée.
Reste à considérer l’environnemental “on est sur des indigos naturels qui n’est pas fixé chimiquement donc il va forcément patiner dans le temps, […] le délavage est fait en France”. Leurs jeans sont confectionnés dans l’Hexagone, dans des conditions de travail respectueuses, “on peut avoir un très bon jean qui a été fabriqué au Bangladesh mais dans des conditions horribles”.
Last but not least, le bon jean est celui qui sera raccommodé plutôt que jeté “si le jean a une bonne tenue, on peut le réparer parce que le reste est parfait”.
Le site Atelier Tuffery
