Plus de projection à 10 ans ni à 2050 : toutes les régions sont à présent touchées par le changement climatique. Nous sommes entré·e·s dans l’ère des virus mutants, des inondations, des séismes et des incendies, des catastrophes climatiques imprévisibles. Deux bonnes nouvelles auxquelles s’accrocher dans le relief de ce sombre tableau : d’une part les scientifiques s’allient pour nous éclairer sur les scénarios à venir, d’autre part, nous avons entre les mains des solutions porteuses de changement. Les inconnues ? Le nombre d’entre nous prêt·e·s à changer significativement de mode de vie, la rapidité avec laquelle ces changements seront mis en place et si cela est suffisant pour enrayer le drame à l’horizon 2050. 42 pages de résultats d’études scientifiques en anglais, pas donné à tout le monde de s’y adonner avec passion. Pourtant ce rapport est d’intérêt public, individuel et collectif. Cet article vous propose une synthèse du 6ème rapport d’évaluation du GIEC. Il sera suivi d’une liste d’actions simples à mettre en place dès à présent dans votre quotidien.
A noter : il s’agit ici de la 1ère partie du rapport, révélant les résultats du groupe de travail sur la physique du climat – passé, présent et futur – en fonction des différents scénarios possibles d’émissions de gaz à effet de serre par l’Humanité. Les conclusions des groupes de travail II (« Impacts, adaptation et vulnérabilité » portant sur les conséquences du changement climatique sur les écosystèmes naturels et les sociétés humaines), et III (« Atténuation des changements climatiques » les adaptations possibles à ces menaces et les mesures politiques à mettre en place ), sont respectivement prévues à paraître en février et en mars 2022. Le rapport de synthèse des travaux des trois groupes de travail est prévu en septembre 2022.
L’inertie est dans les sociétés humaines. C’est la vitesse des changements que nos sociétés humaines sont capables de faire qui va conditionner le climat futur.
Christophe Cassou, climatologue et directeur de recherches au CNRS, co-auteur du rapport du GIEC, sur France Culture.
Le 6ème rapport du GIEC en synthèse
Les sources du réchauffement atmosphérique observé actuellement sont humaines
Cette hypothèse émise dans le 1er rapport du GIEC en 1990 a été validée dans le rapport de 2021. Les scientifiques peuvent désormais lier des événements météorologiques spécifiques au changement climatique d’origine humaine, comme une tempête ou un pic de température particulier. World Weather Attribution, un groupe de recherche international, n’a eu besoin que de quelques jours après le début de la vague de chaleur mortelle qui s’est abattue sur la côte ouest de l’Amérique du Nord en juin pour déterminer notre responsabilité devant des températures extraordinaires estimées « pratiquement impossibles » sans notre intervention.
2010-2020 : décennie la plus chaude en 125 000 ans
En comparaison à 1750, l’ère préindustrielle, le réchauffement atmosphérique mesuré à +1,1° en 2018 est estimé à +1,5° en 2050. En réalité, nous avons déjà produit suffisamment de gaz à effet de serre dans l’atmosphère pour réchauffer la planète de 1,5°C – l’un des objectifs fixés par l’Accord de Paris – mais la pollution aux particules fines provenant des combustibles fossiles réduit artificiellement ce réchauffement, en fournissant un effet de refroidissement (en renvoyant les rayons du soleil vers l’espace).
Le climat est moins résilient que prévu face aux hausses de températures dues aux émissions de gaz à effet de serre
Le réchauffement devrait plus ou moins s’arrêter lorsque les émissions CO2 seront nulles, cela a été reconnu par la communauté scientifique depuis 2008 et le GIEC en 2018. Cette bonne nouvelle est toute relative. D’une part, elle requiert des efforts drastiques pour atteindre les objectifs préconisés (-1,5°) et 2 tonnes d’émissions GES par habitant. D’autre part, les changements climatiques déjà produits seront difficiles à inverser en l’absence d’émissions négatives nettes à grande échelle. Enfin, des incertitudes subsistent quant au devenir des émissions de gaz à effet de serre (GES) autres que liés au CO2 : méthane, oxyde nitreux, aérosols d’origine humaine. A l’heure actuelle, la consommation de combustibles fossiles combinée à l’agriculture est à l’origine d’émissions records depuis au moins 800 000 ans.
La Terre récompense les bons comportements : nous avons le pouvoir de choisir notre avenir climatique
Notre avenir climatique n’est donc pas verrouillé concernant le dioxyde de carbone (C02). Presque aussitôt que les émissions cesseront, le réchauffement cessera et les températures se stabiliseront dans quelques décennies. Mais certains effets, comme l’élévation du niveau de la mer, resteront irréversibles pendant des siècles. Dans la course entre l’évitable et l’inévitable, l’humanité est en retard. Il est donc indispensable d’entamer « des réductions fortes, rapides et soutenues » de nos émissions. Une réduction effective des émissions de méthane a un impact rapide et direct sur la qualité de l’air, la santé et in fine, la qualité de vie.
Les conséquences climatiques sont catastrophiques et déjà concrètes
Le GIEC prévoit une augmentation sans précédent des événements météorologiques extrêmes. Les preuves des changements observés dans les extrêmes tels que les vagues de chaleur caniculaire, les fortes précipitations, les sécheresses et les cyclones tropicaux, et, en particulier, leur attribution à l’influence humaine, se sont renforcées depuis le rapport précédent publié en 2013. Elles augmenteront cycliquement en durée et en intensité. Une vague de chaleur extrême qui ne se serait produite autrefois que deux fois par siècle frapperait plutôt tous les six ans environ au seuil de 1,5 degré, selon le GIEC. Avec 2 degrés de réchauffement, vous pouvez vous y attendre tous les quatre ans. La fonte des glaciers arctiques, calottes glaciaires et des glaciers continentaux se poursuit, responsable d’ une augmentation du niveau de la mer. Enfin, la capacité des forêts à agir comme “puits de carbone” décroît.
Les événements extrêmes sont très corrélés avec la température globale de la planète. Ils sont très sensibles à une petite fraction de degré supplémentaire, et donc, ce qu’on est en train de vivre aujourd’hui, c’est un avant goût de ce qu’on va vivre demain.
Christophe Cassou
Le GIEC a mis en place un atlas interactif permettant une approche régionale. Les régions qui subissent le plus les effets des changements climatiques sont appelées régions sentinelles, comme le Canada ou la Sibérie se réchauffent deux à trois fois plus vite que la moyenne globale, “où on voit le réchauffement climatique émerger fortement de la variabilité ou des fluctuations naturelles du climat que l’on subit tous les jours.” (Christophe Cassou).
Des points de bascule
Les points de bascule sont des évènements de faible probabilité d’advenir mais à très haut risque environnemental. S’ils se produisent, les conséquences sur la vie terrestre, marine et les activités humaines seront dramatiques. Il s’agit par exemple de l’effondrement des calottes glaciaires antarctiques, qui augmenterait le niveau de la mer de façon considérable. Le dépérissement mondial des forêts impacterait le cycle de l’eau; la perturbation de la circulation océanique de l’Atlantique nord transformerait les régimes de pluie en Afrique, dont les moussons qui régulent l’apport en eau toute l’année sur le continent.
« En tant que citoyens d’une communauté mondiale, nous n’avons pas d’autre choix que de canaliser cette nouvelle vers une action positive. Des décisions quotidiennes aux problèmes et actions que nous soutenons et dans lesquels nous nous engageons à plus grande échelle, chacun de nous doit se joindre à cet appel pour affronter la réalité dévastatrice du changement climatique. L’action collective doit être au cœur de notre modèle pour conduire un changement positif, ensemble, afin que notre planète et les générations futures puissent prospérer. ».
Kate Williams, PDG de 1% pour la planète
En conclusion
Le réchauffement climatique et ses conséquences n’épargneront personne, nous avons un budget carbone commun. Le 6eme rapport du GIEC n’est pas défaitiste ni moralisateur, il expose des faits. Le message de ces scientifiques au sujet de ces catastrophes est clair : s’y habituer. La recherche montre que les catastrophes météorologiques ne feront qu’empirer à moins que les émissions de combustibles fossiles ne soient éliminées. A nous de prendre des dispositions désormais urgentes pour passer à l’action. Citoyen·ne·s, Etats, entreprises : personne n’est trop petit pour agir, tout le monde peut s’améliorer dès à présent au quotidien pour œuvrer radicalement à notre futur commun. Ces actions doivent être “immédiates, fortes et soutenues” d’après Christophe Cassou, et peuvent alors avoir un effet rapide et des co-bénéfices dans les 10 prochaines années.
A lire : 15 actions à mettre en place immédiatement suite aux conclusions du rapport du GIEC.
NB : Le rapport est en cours de traduction en français.
Merci pour ce résumé d’utilité public, très intéressant 🙂
Génial, merci d’avoir pris le temps de laisser ce commentaire ! C’est très valorisant pour notre travail 🙂
Merci pour cette synthèse très claire. Tout est dit, après les paroles, l’action. Personne ne doit considérer que c’est aux autres (individus ou personnes morales) d’agir. Chacun doit faire sa part et prendre sa responsabilité.
Merci beaucoup pour ce commentaire qui met en valeur notre travail et donne plein d’espoir ! Les leviers individuels font les grands changements collectifs !